Les 31 août et 1er septembre dernier se tenait le « FEB » ou Forum Economique Breton. Ce temps fort de l’année réunit les entreprises bretonnes qui font la renommée de notre territoire.
J’y intervenais sur invitation du Télégramme et de Femmes de Bretagne. J’ai partagé cette table-ronde avec Elena Maneru (présidente de Femmes de Bretagne), Hélène Bernicot (directrice générale de Crédit Mutuel Arkéa), Christine Lozarchmeur (présidente du Medef 29) et Gwenaëlle Quenaon Herve (directrice générale de Rivacom, vice-présidente du Poool).
Notre sujet : les clés concrètes pour plus d’égalité en entreprise !
Voici ce que j’ai eu à en dire pour répondre aux questions de Gwénaëlle :
Forum Economique Breton : Comment se construisent ces stéréotypes et comment on peut venir déconstruire les idées reçues ?
Je commencerai par montrer un nombre, le nombre 52.
C’est la part des femmes en France à l’heure actuelle. Elle fait écho cette phrase d’Hillary Clinton : « les femmes sont le plus grand réservoir de compétences inexploité ». Je trouve toujours intéressant dans un espace comme un Forum économique, de devoir faire un table-ronde spécifique. A-t-on encore besoin d’évoquer les femmes et le fait que c’est important d’avoir des femmes dans l’entreprise ? Oui malheureusement.
Je vais utiliser un terme que vous ne lirez pas souvent. Un terme que peu de personnes ont déjà dû entendre dans le cadre d’un Forum économique. C’est le terme « pénis ». La compétence n’est pas une question de sexe.
On a codé le monde du travail au masculin pendant très longtemps on a considéré que pour être effectif, efficient, il fallait disposer d’un pénis, donc.
L’histoire des 52% au Forum Economique Breton
En tant que chef et cheffe d’entreprise, vous disposez d’un vivier de compétences. Une partie de celui-ci reste inexploité dans la majeure partie des classes de métiers.
Je parle des femmes.
Or les femmes ont plein de choses à apporter -est-il nécessaire de le rappeler? Il y a à mon sens une responsabilité de l’entreprise, tout comme il y a une responsabilité de notre socle sociétal et éducatif.
Certaines entreprises que je rencontre aujourd’hui me font par de leurs difficulté à trouver et à recruter des femmes, quand elles cherchent certaines compétences spécifiques.
Pour moi l’aspect éducatif est présent derrière tout cela.
On pourrait parler pendant des heures de toutes les études qui démontrent qu’à l’heure actuelle encore à l’école comme dans leur famille, les petites filles ont moins d’espace de parole, moins d’espace physique aussi pour grandir, se construire et se sentir légitimes. Or la question de la légitimité est centrale.
Evidemment j’évoque les choses de façon globale. Peut-être que certains d’entre vous ont eu besoin de temps pour se sentir légitime, peut-être que certaines se sont quant à elles toujours senties légitimes.
Mais malheureusement nous avons encore un gros travail à faire car tout concourt dans la société, l’espace public et l’école pour que nous, femmes, ne nous sentions pas faire partie de ces 52% mais d’une minorité. J’ai donc mené une étude informelle sur toute l’année scolaire 2021-22 dans tous les espaces dans lesquels je suis passée. J’ai posé cette question initiale : selon vous quel est le pourcentage de femme en France.
En moyenne on m’a répondu 25% !
Forum Economique Breton : Ce qu’on comprend c’est que ces stéréotypes sont très ancrés, que recommandez vous au quotidien auprès des entreprises ?
Ça passe par le fait d’utiliser des experts extérieurs. Nous avons toutes et tous été construits dans une société patriarcale (attention gros mots !), donc de hiérarchisation entre les sexes. Ce qui ne veut pas dire qu’individuellement messieurs vous vous sentez supérieurs à nous. Ni que nous, face à vous nous nous sentons inférieures à vous. Tout va bien de ce coté là ! Cependant c’est une réalité dans notre système sociétal.
Le premier acte d’engagement à réaliser consiste à s’entourer d’experts et d’expertes qui viennent soutenir les entreprises.
Nous disposons aujourd’hui un socle juridique extrêmement fourni en termes d’égalité, certes. Mais on voit bien que cela ne suffit pas. Cela montre que la question juridique est la base mais dans le réel il faut se former mais surtout se détricoter.
Notamment, former tous les dirigeants et dirigeantes ainsi que les personnes qui vont s’occuper du recrutement. Il s’agit de prendre conscience des stéréotypes et notamment des stéréotypes de genre qui vont faire filtre dans nos recrutements. On peut avoir de l’expertise dans le recrutement mais aujourd’hui ça ne suffit plus. Il faut se former en plus pour détricoter les stéréotypes de genre.
Forum Economique Breton : Dans ce process de détricotage et formation, on ne s’adresse pas de la même façon aux femmes et aux hommes ?
Globalement, je suis plutôt adepte de la mixité parce que dans « le vrai monde » il y a aussi bien des femmes que des hommes. Nous ne pouvons donc plus partir du principe que l’on forme les femmes dans un coin et les hommes dans un autres. Cependant, les stéréotypes ne pèsent pas de la même façon sur les femmes et les hommes. Toutes les études nous montrent que lorsqu’on sépare les hommes et les femmes sur un temps très court, ils disposent d’un espace de parole pour évoquer leurs réalités encore très genrées pour l’instant.
Je pratique donc des formations en non mixité puis en plénière. Au sein de ce programme, les groupes ont travaillé différemment un même sujet de fond. Il peut s’agir des salaires, du recrutement, du bien-être au travail, du partage de la parole et de l’assertivité par exemple.
Puis ils se retrouvent dans le « vrai monde » professionnel en plénière. Et on continue à avancer.
Une fois ces formations passées il faut solliciter l’engagement les managers, poser un contexte de travail qui permet de mettre des règles
C’est en lien avec les raisons pour lesquelles les entreprises souvent me contactent : une situation difficile, d’urgence, de violences sexistes et sexuelles (VSS). Elles voudront mettre en place une enquête interne ou bien elles ne savent pas quoi faire. Elles me disent par exemple leur embarras car elles sont face à deux très bons éléments. Seulement, l’un aurait agressé ou harcelé et l’autre aurait subi ces violences.
De fait, il faut entendre qu’il y a un terreau propice. Ce terreau conduit une personne à considérer qu’elle peut agresser ou harceler une autre en situation professionnelle. Globalement, c’est bien souvent toute la culture de l’entreprise qui laisse faire, sans vraiment s’en rendre compte.
Il s’agit donc de pratiquer la tolérance 0 à tout instant :
– inscrire ces éléments dans le règlement intérieur : ici on ne harcèle, on n’agresse personne
– faire des rappels réguliers
– que ce soit porté dans toute la culture d’entreprise
L’écrire sur l’affichage obligatoire ne suffit pas.
Prenons l’exemple des fonctionnaires de la Dir Ouest. Ils ont des quarts d’heure de sécurité durant lesquels on leur rappelle de porter leur casque en intervention. Il s’agit désormais de rappeler, partout, la sécurité. Parmi ces éléments, il y a l’interdit de pratiquer de violences sexistes et sexuelles.
Ça impose d’avoir défini le cadre posé par la loi, et de faire sienne cette loi au quotidien, et à tout instant.
Je vous sollicite donc vous qui êtes présentes et présents aujourd’hui, pour penser à contacter les expertes et experts à tout instant. Pas seulement en situation d’urgence. Parce qu’alors nous avons un travail immense à faire, qui est entaché par une situation toujours dramatique pour la ou les personnes victimées et pour l’entreprise toute entière.
Le travail que je fais avec Egaluce, c’est celui de soutenir les entreprises dans leur démarche de qualité de vie et des conditions de travail.
Avec Egaluce, passez en mode solutions !
Plus personne aujourd’hui ne peut mettre en doute que des inégalités persistent au sein de l’Entreprise ainsi que des organisations publiques. Le rôle d’Egaluce n’est donc pas seulement de faire un constat, mais d’accompagner toutes les organisations dans leur diagnostic propre et surtout à construire leur plan d’action.